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Son droit ? Le ridicule du mot la frappa. Le droit, cette fiction de l’homme, fabriquée, avec sa société ! Ce rouge étendard de l’esclave révolté dans la guerre inexpiable qui, depuis Prométhée, se termine toujours, toujours, par l’écrasement ! Ou cette hypocrisie du plus fort qui écrase le plus faible, abattu, en attendant qu’il soit abattu, à son tour !… En face de la nature, il n’existe pas de droit. La force indifférente se nourrit des millions de vivants. Une entre les millions, Annette était sa victime. Elle pouvait retarder d’un jour, d’une heure, sa défaite, aux dépens d’autres victimes. Mais la défaite venait. Et valait-il la peine de la retarder, par la souffrance d’autres victimes ? …

Elle cria :

— Pourquoi pas ?… Un jour, une heure de possession, un instant, n’est-ce rien ? L’éternité est dans un instant, comme dans un être, l’univers… Et la souffrance de l’autre victime, de la rivale dont on se venge, n’est-ce rien, n’est-ce rien ? Rien, ce bonheur qui vous échappe, que la voleuse vous ravit, — le lui ravir à son tour, la faire souffrir, la détruire !…

Un tourbillon d’oiseaux sauvages s’abattait