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Et tout s’arrête. L’essor se brise. L’âme retombe. Depuis octobre, l’action piétine. Le danger suprême est passé. L’épine est pour longtemps enfoncée dans la chair, qui s’envenime. Il faut s’organiser pour vivre ainsi, des ans. Mais qui pourrait, d’un cœur ferme, envisager ces ans ? On se ment. On nous ment. Pour maintenir l’exaltation, on a recours aux moyens factices : la « gniole » de la presse, — ses leurres et ses atrocités. (Elles sont bien siennes : elle les accueille, elle les invente, avec une joie de cannibale.) Et le public, comme un ivrogne, est secoué, dans sa torpeur, par des sursauts de haine rouge.

La maison cuit dans son jus, de souffrance, d’irritation, d’impatience, d’ennui. L’hiver se traîne. La morbide fermentation des âmes apparaît, à la morne lumière.

Les deux réfugiés du Nord, Apolline et Alexis Quiercy, étaient restés chez Annette. Elle les