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petite ville du Jura suisse. Qui eût su le vrai et les eût vus rire, les jugerait fous. Mais leurs nerfs avaient été trop tendus. Il y aura toujours le temps, après, pour la peine !…

Ils finirent par s’assoupir, en causant. Et, brusquement, la tête de Franz s’appuya sur l’épaule d’Annette ; et sur les cheveux de Franz, la joue d’Annette endormie… Mais au milieu d’un rêve, soyeux comme son oreiller, le devoir la réveilla :

— « Lève-toi !… »

(Elle résistait…)

— « Lève-toi ! On frappe… »

— « Qui donc ? »

— « Un que tu aimes !… »

(Elle vit Marc ; mais elle désignait sa figure, d’une suite de noms divers.)

— « …On le poursuit. Lève-toi ! Ouvre !… »

Elle fit effort, elle retomba comme dans ses draps, elle reprit souffle, elle sauta du lit. Ses yeux s’ouvrirent. Il faisait jour. Le train venait de s’arrêter. C’était ici que Franz devait descendre. Elle l’éveilla précipitamment. Elle descendit avec lui. Ils entrèrent, ainsi qu’il était convenu, à la buvette. Un paysan grisonnant vint s’asseoir à leur table. Il était placide et lent, dans son parler et ses mouvements. Il demanda des nouvelles de Pitan. Ils burent ensemble le café noir. Au