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L’esprit défaille, et le corps parle… Le frère perdu retrouve la sœur…

Il se croyait égaré sans espoir, et seul, incapable de savoir où aller, quand descendre, comment se diriger, il était affolé. Annette lui apparut un ange envoyé des cieux. Il l’étreignait, comme un enfant. Et elle, heureuse, le couvait : ainsi, la poule son poussin. L’un contre l’autre, ils se contèrent, à voix basse, à demi-mots, leur équipée. Pitan, malin, avait évité la souricière de la station, l’avait conduit à travers champs, jusqu’au remblai où les travaux obligeaient le train à s’arrêter ; et là, dans la nuit, Franz était monté…

Une heure plus tard, on changeait de train. On contrôla les billets. Le plus grand risque était passé. Restait bien le saut périlleux par la frontière. Mais la confiance était revenue dans les cœurs. À présent, Franz ne doutait de rien. Sans transition, il avait passé d’un extrême à l’autre. Et son allégresse de grand gamin avait gagné sa compagne. Elle ne pensait plus à sa fatigue, à ses soucis, à ses mauvais rêves, à son cher garçon, ni aux cheveux blancs dans sa crinière. Très excités, riant, causant, ils étaient deux écoliers qui se réjouissent d’une bonne farce. Ils faisaient le frère et la sœur. Et même, Franz s’amusait à jouer un entretien inventé sur leur commerce d’horloger et sur leurs voisins aux noms saugrenus, dans une