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échappait à la surveillance et des yeux de province, et de ceux de Paris. Car à aucun des siens elle ne faisait connaître son passage à Paris. Sylvie savait seulement que sa sœur venait d’être congédiée, et elle en avait appris la cause ; mais elle ignorait la date de son retour. Annette ne ferait que toucher terre, à Paris, juste le nombre d’heures qui lui étaient nécessaires pour les préparatifs de son expédition ; et elle attendrait le succès de celle-ci, pour s’annoncer aux siens. (Si c’était l’insuccès, ils l’apprendraient assez tôt !)

Elle arriva donc, sans qu’on le sût, le soir du 9 novembre, après la nuit tombée ; et elle prit logement dans un petit hôtel, aux abords de la gare du P.-L.-M. La chance encore la favorisa. La frontière franco-suisse était constamment fermée. Elle l’avait été, fin octobre, à la suite des désastres italiens. Elle l’était encore, le 9 novembre. Le 10, elle se rouvrit, — disait-on, pour un jour. C’était le jour fixé. Annette, fiévreusement, passa la matinée et presque toute l’après-midi en formalités, attentes, stations interminables à la Préfecture de Police, puis aux Affaires Étrangères, pour retirer les passeports et les faire viser ; et elle prit à la gare les billets de chemin de fer. Après que ce fut fini, — (la journée de bruine, sans lumière, déclinait) — Annette rentra à l’hôtel, afin de s’y reposer, en prévision de la nuit