Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 3.djvu/313

Cette page n’a pas encore été corrigée

Annette, de nouveau, rougit. (Qu’il est jeune, encore, son sang !)

— Non, point d’amour, Pitan, je vous assure ! Je suis une trop vieille femme. Ce n’est plus de mon âge. Je n’y ai même pas songé. Je ne pense qu’à leur amitié — pas celle qu’ils ont pour moi : je ne compte pas, à leurs yeux — leur amitié mutuelle.

— Et c’est pour elle ?…

Pitan n’achève pas sa pensée. Annette dit :

— Cela ne vaut-il pas la peine de se sacrifier ?

Pitan la contemple. Elle ajoute, comme pour se justifier :

— L’un des deux va mourir… Alors, n’est-ce pas, Pitan, il n’y a pas à discuter.

Pitan ne discute pas. Il a compris. La folie même du généreux dessein est faite pour le persuader. Mais ses yeux couvent Annette, avec vénération.

— Vous ne pouvez pas, seule, dit-il, après réflexion.

— S’il le faut, répond-elle.

Pitan réfléchit encore ; puis, il s’incline devant elle, et il ramasse la poussière du sol avec deux doigts. Il la porte à son front.

— Que faites-vous ? dit Annette.

— Je m’enrôle dans votre bataillon… Voyez-vous, madame Rivière — (il a pris un escabeau