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qu’il aimait plus que lui-même, c’était lui-même qu’il aimait en lui, — l’écho vivant et la réponse qui recueille, et qui prolonge, son frêle chant.

Le chant de Germain était plus ferme. Sa mélodie allait, d’un souffle, sans se briser. La ligne nette ne se fleurissait point de ces vocalises et de ces trilles. Il se dominait. Il parlait peu de lui. Il ne disait rien — presque rien — de son état ; car il songeait à l’autre, et il craignait de l’alarmer. Mais ses lettres étaient pleines de questions sur la santé de l’ami, sur son hygiène, sur sa conduite avec les chefs et avec ses compagnons Il consolait, il conseillait, il apaisait, il n’était jamais las de répéter ses admonestations tendres, patientes et pressantes, au grand enfant, qui ne les écoutait qu’à moitié. Cette insistance minutieuse était un peu ridicule. Mais à ce railleur, il était indifférent qu’on en rît. Et si Annette souriait, en le lisant, c’était de retrouver en cet homme ses propres obsessions, cette maternité du cœur qui ne sait se borner dans son besoin inquiet de protéger. Elle découvrait en ces deux garçons la femme éternelle, qui est en chaque être ; mais l’éducation de l’homme l’étouffe ; il rougirait de l’avouer. Elle en était attendrie, car elle en reconnaissait la pureté.

Rien d’équivoque. Une clarté de cristal. Une passion aussi naturelle, aussi fatale qu’une loi de