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le bonheur, — et de risquer… Risquer !… Elle était joueuse… (Germain l’avait bien vu.) En d’autres temps, elle eût joué sa vie, avec transport. Et, avouons-le, du moment qu’il l’eut vu, Germain en abusa. Il ne la ménagea plus. Il oublia les risques où il l’engageait. La maladie n’a point de pitié.

Annette se mit en marche ; et elle réussit à retrouver la trace du jeune prisonnier. Il était enfermé dans un camp de concentration, près d’Angers. Par l’entremise de l’Agence Internationale des Prisonniers, à Genève, elle fit passer une lettre ; et le fil de la vie fut renoué entre les deux amis. Annette envoyait et recevait, sous son nom, les lettres de l’un et de l’autre. Elle allait secrètement les prendre et les remettre, chez Germain.

Quand ses yeux se posèrent sur les premières lignes de la première lettre de Franz, elle ne put les en arracher : c’était un tel cri d’amour qu’elle en fut enlacée, comme avec les deux bras. Elle essaya de se dégager ; mais la force lui manqua : elle lut jusqu’au bout. Et quand ce fut fini, la lettre sur ses genoux, elle restait hors d’haleine, comme après un assaut. Elle eut beaucoup de peine à cacher aux Chavannes le rayonnement qui l’entourait. Mais seule avec Germain, une