Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 3.djvu/227

Cette page n’a pas encore été corrigée

que les autres veulent être aimés de vous, non pas pour ce que nous sommes, mais pour ce qu’ils sont…

— Quelle prétention, n’est-ce pas ? Mais il faut l’accepter… Et depuis, j’ai tâché…

Il contait l’aventure, comme toujours, en plaisantant.

— Tout accepter de ceux qu’on aime, dit Annette, ce n’est point malaisé, quand seule, on paye les frais. Mais quand c’est eux qui payent, ou que ce sont les voisins, peut-on s’y associer ?

— Vous voulez dire, la guerre ?

— La guerre, la paix, qu’importe ! Cette forêt de Bondy, où les forts mangent les faibles, et trouvent de plus forts qui les mangent, à leur tour !

— Il n’y a que des faibles, vous venez de le dire. Au bout du compte, ils seront tous mangés.

— Je suis avec ceux qu’on mange !

— Hé hé ! vous vivez, et vous avez de belles dents !

— Je voudrais n’avoir que des lèvres, pour baiser tous les vivants. Mais puisque l’Innommable m’a mis dans la bouche ces couteaux, que ce soit seulement pour défendre mes enfants !

— Vous voici la guerre en personne !

— Non, c’est contre la guerre que je les défends.

— Ils sont tous comme vous… Disons : les