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Krichna combat contre Krichna ; et il n’est point du tout certain que le fruit du combat soit la vie, ou la mort, la totale destruction. Germain voyait l’incompréhension mutuelle, il la voyait universelle, il la voyait éternelle. Et il n’avait pas la chance d’y participer. Il avait le don funeste de dire oui à sa pensée, et de ne pas dire non à la pensée des autres : car il la comprenait. Et il était plus attentif à la pénétrer qu’à tâcher de la changer.

Il n’avait pas toujours été ainsi. Il était parti dans la vie, avec son moi entier, qui ne se souciait pas, lui non plus, de comprendre, mais de prendre. Ses yeux s’étaient ouverts, aux doigts des déconvenues. Il conta l’une, tranquillement, à Annette. (Avec elle, point de gêne ! Elle lui paraissait une camarade intelligente, qui connaissait la vie, qui avait dû passer par des expériences analogues aux siennes.)

Il avait aimé une femme, aimé tyranniquement. Il prétendait l’aimer selon son cœur à lui, et non son cœur à elle. Ce qu’il jugeait bon pour lui, il le jugeait bon pour elle. Puisqu’ils s’aimaient tous deux, n’étaient-ils pas le même ? Elle l’aima, et se lassa. Un jour, rentrant chez lui, il trouva la cage vide. Elle avait fui. Quelques lignes d’adieu lui expliquèrent pourquoi. L’expérience fut rude, mais elle porta. Il apprit