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encore qu’il ne pensait. Il était de Cambrai. Il se trouva aux avant-postes. Pour un homme de son âge, c’était là un honneur dont il se fût passé. Il fit bonne figure cependant, au départ. Il le fallait bien ! Sylvie était héroïque ; et il y avait peu de pitié à attendre des yeux de ces autres femmes. Chacune avait son homme, son mari, son amant, son fils, son frère, qui partait. Qu’ils partissent tous ensemble donnait à l’anormal un semblant de régularité. Le trouble eût été pour elles que l’un d’eux discutât. Aucun ne s’y risqua. Léopold n’y songea point. Non moins que l’ordre d’appel, l’acceptation des siens était catégorique. Et ce petit loup, Marc, qui, d’un regard soupçonneux, jalousement épiait sa faiblesse !… Il crâna. Pour le souper d’adieu, le bon gros trinqua avec tout l’atelier. Il avait le cœur lourd, pourtant, de le quitter. Mais, pour ses intérêts, il pouvait être sûr que Sylvie saurait les bien garder. Le reste !… le mieux était peut-être de ne pas y penser… Elle était une Lucrèce, pour l’instant… Sacrée femme !… Il lui mouilla la joue de sa larme, en la quittant. Elle dit :

— Ce sera une promenade. Quel magnifique été ! Prends garde de t’enrhumer !

Annette l’embrassa. (C’était autant de gagné !) Elle avait pitié de lui. Mais elle ne le montra point, pour ne pas l’affaiblir… « N’est-ce pas ? Puisqu’il le faut !… » Et le regard qui quêtait ne