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demi-latin, des bords du Rhin. Une affreuse blessure. Le ventre ouvert… « Jam foetebat… » Et déjà les vers y remuaient. Il était secoué de soubresauts, il serrait les dents sur sa douleur, mais par accès, il hululait. Ses yeux se fermaient et se rouvraient, cherchant un être, un objet, n’importe quoi qui fût dans la vie, un point ferme dans son naufrage, où s’accrocher. Ils rencontrèrent les yeux d’Annette, et les happèrent… Ces yeux de pitié… Dans sa détresse, ah ! quelle lumière inattendue ! L’espoir englouti, du fond de l’eau ressurgit. Il cria :

Hülfe ! [1]

Elle se pencha. Elle mit sa main sous la tête qui se soulevait. Elle murmura, à son oreille, des mots allemands compatissants. Sur sa peau sèche et brûlante, ce fut une pluie. Il lui saisit l’autre main libre, y entra ses doigts. Elle ressentit au fond de sa chair chaque tressaillement de l’homme qui mourait. Elle lui soufflait la patience. Le brave petit ravalait son souffle, pour étouffer son cri. Il serrait plus fort la main, qui le tenait au-dessus du gouffre. Les yeux d’Annette se faisaient plus tendres, à mesure qu’elle le voyait sombrer. Elle dit ;

Söhnchen ! Knäbelein ! Mein armer lieber Kleiner !… [2]

  1. « À l’aide ! »
  2. « Mon fils ! Mon petit garçon ! Mon pauvre cher petit !… »