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Votre mal, le chancre qui vous ronge, c’est l’inaction qui l’a causé. Seul, le travail peut vous sauver.

— Je ne peux pas.

— Quoi, vous, robuste et habituée aux durs travaux de la campagne, vous qui souffrez de votre vigueur à dépenser, vous l’enfermez dans l’oisiveté, comme un loup en cage, et entre les barreaux, vous hurlez à Dieu !… Dieu, c’est le travail.

— Je ne peux plus. Il me faut mon bien. Il me faut ma terre. Ils m’ont tout pris, tout détruit : mon bien, ma terre, tous les miens. Il ne me reste rien. Il ne me reste que lui. (Elle montrait la chambre d’Alexis.) Et je le hais ! Et je me hais ! Et je hais Dieu, qui l’a voulu.

— Et moi, je le plains, — qui ne crois pas en lui. J’ai pitié de lui. Vous le trahissez. Haïr, haïr, l’unique mot qui remplit vos bouches. Vous ne connaissez rien d’autre. S’il y a un Dieu, il vous a donné la volonté. Qu’en faites-vous ?

— Je la vautre dans cette bauge, dans cette chair qu’il m’a donnée. Je me venge sur lui. Il est en moi. Je me détruis.

— Votre Dieu est comme le scorpion. S’il ne peut détruire, il se détruit.

— C’est le Dieu de Verdun, le Dieu d’aujourd’hui.