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était faible, il affichait ce cynisme ricanant, qui avait révolté Annette :

— Tant pis pour moi, comme pour les autres ! Tant pis pour ceux qui tombent ! C’est à moi de m’arranger, ou par la force, ou par la ruse, pour me trouver dessus !…

Il lui plaisait de mépriser les protestations indignées de sa mère contre cette forfanterie d’inhumanité. Il les taxait dédaigneusement de « sentimentalisme » : c’était tout dire !…

— Fadeur et fadaises ! Article de femme Farde ton museau ! Moi, j’ai mes dents à aiguiser…

Il est vrai qu’Annette baignait alors en pleine confusion. Elle acceptait encore la guerre, en se refusant à en accepter l’ignominie, qui est l’immonde haleine du carnassier. Elle s’arrêtait à mi-chemin de la pensée ; elle n’osait pas regarder au fond. Aussi avait-elle peine à motiver ses révoltes par des raisons de l’esprit. Il lui suffisait, pour se guider, de son sens intérieur. — C’était trop peu pour Marc. Un homme a besoin d’idées nettes, — fausses ou non — afin d’étiqueter ses passions.

Des idées nettes, Marc en trouva, à poignées, chez les logiciens de la pensée ouvrière. Toutes leurs révoltes étaient rigoureusement déduites et construites sur des échafaudages de chiffres et de faits. — La parole sans apprêt, lente, tâton-