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hautain édifice, qui veut, pour le construire, des mains et des cœurs purs, comme ceux des Reclus et des Kropotkine. Il ne sera jamais habité que par une élite stoïque. La foule qui s’y rue le dégrade, comme elle a dégradé les basiliques du Christ, en les peuplant de ses dégoûtants petits dieux, entremetteurs de Dieu.

Mais le seul mot de Liberté a une vertu magique, même sur les âmes embourbées dans la fondrière de leurs désirs. C’est un souffle d’héroïsme, (Illusion ?… Qu’importe !) qui nie la servitude, toutes les servitudes, dont elles sont ligotées… Épigones lamentables du Titan insurgé contre le « Sic volo jubeo » du Tyran !… En ces épaves, on retrouve le feu sacré de Prométhée.

Marc en vit, sous ses pas, crépiter l’étincelle.

C’était à l’heure d’exception, où les frères ennemis : anarchistes, socialistes, syndicalistes, révoltés contre la guerre, oubliaient leurs querelles pour s’unir sur ce terrain. On était si peu nombreux ! À peine une poignée ! Tous les autres avaient déserté, — par faiblesse devant l’opinion, par peur des sanctions, par vieux instincts réveillés d’orgueil national, ou de sang à laper, surtout par confusion, — l’épouvantable confusion d’idées oratoires, dont sont gavées les démocraties, comme dindons. Jamais Jésuites, aux temps florissants de la casuistique, ne firent un aussi