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de malpropreté physique et morale, d’alimentation malsaine, de boisson, de travail et de divagations, disproportionnés avec son âge, — Casimir brûlait par tous les bouts.

L’éréthisme de l’esprit n’était pas moins dangereux que celui du corps. Mais il était plus fécond, et ils formaient ensemble un monstrueux équilibre, qui surmenait l’être avant sa maturité et le laissait fourbu, à l’heure où il eût eu besoin de sa pleine force pour agir. Du moins, l’empêchait-il de sombrer dans la sentine charnelle. Oui, même cette folle tension de tous les désirs, cette hystérique liberté, sans aucun frein moral, mais sans les préjugés qui sont la rançon de la morale ordinaire, faisait, par brusques bonds de l’esprit capricant, atteindre aux verts buissons dans la lumière, où bandaient les bourgeons de la pensée à venir. La chèvre n’y restait point ; elle redescendait, d’un saut, mais elle gardait entre ses dents l’amertume tonifiante de la saine mâchée.

Casimir était anarchiste. L’orgueil d’autodidactes, gonflés d’une science mal choisie et plus mal digérée, l’égoïsme dogmatique et le cabotinage, le goût des vaines parlottes, l’aberration sexuelle, la destruction maniaque de toutes les valeurs établies, une forfanterie d’immoralisme, la violence mutuelle des coteries et des individus qui s’envient, — ont toujours fait ravage dans le