rentes, d’une voix qui muait, bredouillante et étranglée, avec des gestes maladroits, rougissant, près de pleurer. L’œil curieux et railleur du valet impassible lui faisait perdre le fil de ses idées. On le poussait vers la porte ; il se rebiffa sottement, criant qu’il défendait qu’on le touchât : le domestique lui dit de filer, et que s’il ne se taisait pas, on téléphonerait au concierge de le faire descendre… La porte se referma sur son dos. Honteux et furieux, il restait sur le seuil, ne pouvait se décider à partir. Et comme, machinalement, il s’appuyait sur le vantail, il sentit que la porte était mal fermée et cédait. Il poussa le battant et rentra. Il voulait à tout prix parvenir jusqu’à Noémi. Le vestibule était vide. Il savait où était la chambre, il s’insinua dans le couloir. Il entendit à l’intérieur la voix de Noémi. Elle disait au valet :
— Zut et zut ! Il m’embête !… Vous avez bien fait de le moucher, ce serin !…
Il se retrouva sur le palier. Il fuyait. Il pleurait, il grinçait des dents, il était égaré. Sur une marche de l’escalier il s’assit, suffoquant. Il ne voulait pas, dans la rue, qu’on le vît pleurer. Ses larmes essuyées, se composant un calme qui recouvrait une douleur enragée, il reprit sans le savoir le chemin de sa maison. Il était désespéré… Mourir, il voulait mourir ! La vie n’était plus possible. Elle était trop laide, trop basse, elle mentait, tout mentait !… Il ne pouvait plus respirer. En traversant la Seine, il songea à s’y jeter. Mais un autre malheureux l’avait déjà devancé. Les berges étaient comme noires de mouches. Un millier de personnes — hommes, femmes, enfants, — penchés sur le parapet, regardaient avidement retirer un noyé. Quels sentiments les poussaient ? Très peu, le frisson sadique. Assez peu, la pitié. L’énorme majorité, l’attrait du fait-divers, curiosité désœuvrée. Un bon nombre, peut-être, un retour sur soi-même : voir comment on souffre ( « comment