Mais Noémi, relevée d’un bond, embrassait Annette, avec des protestations éperdues… (Jamais elle ne l’avait tant haïe ! Elle la tenait enfin… La tenait-elle ?…) Annette disait déjà :
— Non ! Non !…
Noémi faisait semblant de ne pas entendre. Elle l’appelait sa chérie, et sa meilleure amie, elle lui vouait une reconnaissance, un amour éternels. Elle riait et elle pleurait. Mais elle ne perdait pas son temps en vaines effusions. Elle voulait savoir ce qu’Annette ferait pour écarter Philippe. Annette se révoltait :
— Je n’ai rien dit !
— Vous avez dit, vous avez dit, vous me l’avez promis ! …
— Une parole échappée…
— Une parole ? Votre parole !
— Vous me l’avez arrachée, par surprise…
— Non, vous n’en avez qu’une, vous ne pouvez la reprendre. Vous avez dit : « Gardez-le ! » Vous l’avez dit, Annette. Dites que vous l’avez dit ! Vous ne pouvez pas le nier…
— Laissez-moi ! Laissez-moi ! fit Annette, épuisée. Ne me tourmentez pas ! Je ne peux pas, je ne peux pas… Elle s’assit, brisée ; et Noémi, debout près d’elle, continuait de la harceler. Les rôles étaient changés. Annette se refusait à renoncer : son amour était enraciné. Noémi ne s’en souciait guère : Annette pouvait bien garder son amour, pourvu qu’elle ne gardât point Philippe ! Elle voulait qu’Annette rompît. Tout de suite, sans attendre. Et des moyens de rompre, elle en pouvait suggérer, elle en avait plein la tête. Elle la pressait, flattait, suppliait, violentait, embrassait, elle l’étourdissait du flot de ses paroles, elle faisait appel à son cœur magnanime, elle priait, adjurait, exigeait, elle dictait les réponses…
Annette, rigide et glacée, ne disait plus un mot. Elle