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— Que vous le vouliez ou non, c’est fait maintenant. Votre présence l’a tué.

— Vous ne pensez qu’à vous.

— On ne pense qu’à soi, en amour.

— Non, non, ce n’est point vrai ! Je pense à moi, à vous, à celle qui vous aime, à tout ce que vous aimez, et à tout ce que j’aime. Je voudrais que mon amour fût bon et joyeux pour tous.

— L’amour est un duel. Si l’on regarde à droite, à gauche, on est perdu. Regardez droit dans les yeux de l’adversaire, qui est là devant vous !

— L’adversaire ?

— Moi.

— Vous, en effet. Je ne le crains pas. Mais elle, Noémi, n’est pas mon adversaire. Elle ne m’a point fait de mal. Puis-je venir dans sa vie pour la détruire ?

— Vaut-il mieux lui mentir ?

— La tromper ?… Plutôt encore la détruire !… Ou me détruire. Renoncer.

— Vous ne renoncerez pas.

— Qu’en savez-vous ?

— La femme que vous êtes ne renonce point par faiblesse.

— Pourquoi ne serait-ce pas par force ?

— Je ne reconnais point de force à abdiquer. Je vous aime et vous m’aimez. Je vous défie de renoncer.

— Ne me défiez point !

— Vous m’aimez.

— Je vous aime.

— Alors ?…

— Alors… vous dites vrai, je ne puis pas, je ne puis pas renoncer.

— Alors ?

— Alors, qu’il en soit ainsi !…