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sur la cour, et une cuisine où le fourneau et l’évier prenaient presque toute la place.

Entre la chambre de la mère et celle de l’enfant, la porte restait ouverte ; et Marc était trop petit pour protester. Il se trouvait à cet âge indécis qui flotte entre la première enfance asexuée et le premier éveil incertain du petit homme. Il n’était plus dans l’une, et pas encore dans l’autre. Il lui arrivait encore de courir de son lit dans celui de sa mère, le matin du dimanche ; et il se laissait, aux grands jours, faire la toilette par elle, des pieds à la tête. À d’autres jours, il avait des effarouchements pudibonds. Aussi, des curiosités. Et surtout, des accès de cachotterie, qui ne voulait pas être troublée. Il fermait sournoisement sa porte. Annette la rouvrait. Il ne pouvait faire un mouvement, sans qu’elle l’entendît. C’était assommant ! Mais il pouvait aussi ne faire aucun mouvement. Alors, elle l’oubliait, pendant un peu de temps. Pas longtemps !…

Heureusement, Annette n’était pas toujours là. Elle devait sortir. Marc allait à son lycée, qui n’était pas éloigné. Annette l’y conduisait, le matin, et, quand elle était libre, — (rarement) — l’après-midi. Mais elle ne pouvait l’y reprendre, pour le ramener au logis : car c’était l’heure de ses leçons. Il devait rentrer seul, et elle s’inquiétait. Elle avait tâché de s’entendre avec une famille voisine, pour que la domestique, en ramenant l’autre enfant, prît Marc. Mais cela ne faisait pas l’affaire de Marc ; et il filait, avant. Alors, fier et craintif, il revenait seul, et seul il s’enfermait dans l’appartement. Jusqu’au retour de sa mère, il avait de bons moments ! Annette le grondait de son indépendance. Mais elle n’était pas trop fâchée. — (elle ne s’avouait pas ce mauvais sentiment) — qu’il se passât de camarade. Elle se méfiait des camarades. Elle ne voulait pas qu’on pût lui gâter son fils… Son fils ! Elle est donc bien sûre qu’il est à elle ? Certes, elle fait effort pour comprimer son amour