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78 L'AME ENCHANTÉE

faite !… Ah ! ce mot : « passer »…, pour le monde du cœur ! Et qu’on le dît en riant !… Mais cette grande nouvelle — (c’en était une pour elle) — fut, peu après, suivie d’une autre découverte. Un jour qu’Annette annonçait l’intention d’aller prendre sa sœur, au sortir de l’atelier, Sylvie dit tranquillement :

— Non, non, je n’y suis plus…

— Comment ? fit Annette, étonnée. Depuis quand ?

— Oh ! depuis quelque temps…

(Toujours la même façon évasive de compter ! Ç’aurait pu être aussi bien la veille que l’an dernier !)

— Qu’est-ce qui est arrivé ?

— Il est arrivé… ce qui arrive chaque année : (ainsi que dans Malbrough… « sà sa Pâques ou à la Trinité… » ) Sitôt après le Grand-Prix, vient la morte-saison. Les patronnes se font rosses, pour nous fournir généreusement le prétexte de nous faire fiche à la porte.

— Mais alors, où es-tu ?

— Oh ! je suis ici et là. Je vais, je cours, je fais un peu de tout.

Annette était consternée :

— Alors, tu es sans place, et tu ne me le dis pas !

Sylvie jouait celle « qui ne s’en fait pas », qui a bien l’habitude ! Négligemment, elle expliquait,