Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 1.djvu/175

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.




Dans le monde où elle allait, Annette avait de grands succès. Elle était courtisée par la plupart des jeunes gens. Les jeunes filles, dont beaucoup étaient plus jolies, ne lui en savaient pas très bon gré. Elles avaient d’autant plus de raisons d’être froissées qu’Annette ne semblait pas se donner grand mal pour plaire. Distraite, un peu lointaine, elle ne faisait rien pour piquer l’intérêt ou flatter l’amour-propre des hommes qui la recherchaient. Tranquillement installée dans un coin du salon, elle les laissait venir, sans qu’elle parût remarquer leur présence, écoutait en souriant, (on n’était jamais sûr qu’elle avait entendu), et, lorsqu’elle répondait, ne sortait guère d’aimables banalités. Cependant, ils venaient tous, et tâchaient de la captiver : les mondains, les brillants, et les honnêtes jeunes gens.

Les jalouses prétendaient qu’Annette cachait son jeu, et que son indifférence n’était qu’une ruse de coquette avertie ; elles faisaient remarquer que, depuis quelque temps, la correction un peu froide d’Annette dans sa mise, avait fait