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LE BUISSON ARDENT

espèce plus originale. C’était un facteur, qui se nommait Hurteloup. Bel homme, grand, les yeux clairs, petite barbe et moustache blondes, l’air ouvert et gai. Un jour qu’il apportait une lettre recommandée, il était entré dans la chambre d’Olivier. Pendant qu’Olivier signait, il faisait le tour de la bibliothèque, le nez sur les titres des volumes :

— Ha ! ha ! fit-il, vous avez les classiques… Il ajouta :

— Moi, je collectionne les bouquins d’histoire. Et tous sur la Bourgogne.

— Vous êtes Bourguignon ? demanda Olivier.

— « Bourguignon salé,
L’épée au côté,
La barbe au menton,
Saute Bourguignon. »

répondit, en riant, le facteur. Je suis du côté d’Avallon. J’ai des papiers de famille qui datent de 1200 et quelque…

Olivier, intrigué, voulut en savoir davantage. Hurteloup ne demandait qu’à parler. Il appartenait en effet à une des plus vieilles familles de Bourgogne. Un de ses ancêtres était à la croisade de Philippe-Auguste ; un autre avait été secrétaire d’État sous Henri II. La décadence avait commencé, dès