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Christophe revit encore une fois sa terre. Il passa les deux jours qui lui étaient accordés, ne s’entretenant qu’avec elle et avec ceux qui étaient en elle. Il vit la tombe de sa mère. L’herbe y poussait ; mais des fleurs y avaient été déposées récemment. Côte à côte dormaient le père et le grand-père. Il s’assit à leurs pieds. La tombe était adossée au mur d’enceinte. Un châtaignier qui poussait de l’autre côté, dans le chemin creux, l’ombrageait. Par-dessus le mur bas, on voyait les moissons dorées, où le vent tiède faisait passer des ondulations molles ; le soleil régnait sur la terre assoupie ; on entendait le cri des cailles dans les blés, et sur les tombes la douce houle des cyprès. Christophe était seul et rêvait. Son cœur était calme. Assis, les mains jointes autour du genou, et le dos appuyé au mur, il regardait le ciel. Ses yeux se fermèrent, un moment. Comme tout était simple ! Il se sentait chez lui, parmi les siens. Il se tenait auprès d’eux, comme la main dans la main. Les heures s’écoulaient. Vers le soir,

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