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LA FIN DU VOYAGE

— Écoute, veux-tu que je te donne des leçons ?

Elle fut transportée, elle lui baisa les mains.

— Ah ! dit-elle à Christophe, comme je l’aurais aimé !

Mais tout de suite, il ajouta :

— Seulement, ma petite, tu sais, rien pour rien…

Elle était vierge, elle avait toujours été d’une pudeur farouche vis-à-vis des attaques dont on l’avait poursuivie. Cette chasteté sauvage, ce besoin ardent de pureté, ce dégoût des actes malpropres, de la sensualité ignoble, sans amour, elle les avait toujours eus, depuis l’enfance, par écœurement des tristes spectacles qui l’entouraient dans sa maison ; — elle les avait encore… Ah ! la malheureuse ! elle avait été bien punie !… Quelle dérision du sort !…

— Alors, demanda Christophe, vous avez consenti ?

— Ah ! dit-elle, je me serais jetée dans le feu, pour sortir de là. Il menaçait de me faire arrêter comme voleuse. Je n’avais pas le choix. — C’est ainsi que j’ai été initiée à l’art… et à la vie.

— Le misérable ! dit Christophe.