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LA FIN DU VOYAGE

— Oui… c’est mon frère.

Christophe comprit :

— Ah ! dit-il… Je sais… Moi aussi, j’en ai un…

Cécile lui prit la main, avec une commisération affectueuse :

— Vous aussi ?

— Oui, fit-il… Ce sont les joies de la famille.

Cécile rit ; et ils changèrent d’entretien. Non, les joies de la famille n’avaient rien d’enchanteur pour elle, et l’idée du mariage ne la fascinait point : les hommes ne valaient pas cher. Elle trouvait bien des avantages à sa vie indépendante : sa mère avait assez longtemps soupiré après cette liberté ; elle n’avait pas envie de la perdre. Le seul rêve éveillé qu’elle s’amusât à faire, c’était — si elle pouvait un jour, plus tard, Dieu sait quand ! — de ne plus donner de leçons et de vivre à la campagne. Mais elle ne prenait même pas la peine d’imaginer les détails de cette vie : elle trouvait fatigant de penser à quelque chose d’aussi peu certain ; il valait mieux dormir, — ou faire sa tâche…

En attendant qu’elle eût son château en Espagne, elle louait pendant l’été, dans la