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DANS LA MAISON

Tous ces prodiges, accomplis en vingt ans, et où il y avait de quoi alimenter vingt Iliades, où sont-ils, où est leur trace de feu dans les livres de vos poètes ? Sont-ils les seuls à ne pas voir la poésie du monde ?

— Patience, mon ami, patience ! lui répondait Olivier. Tais-toi, ne parle pas, écoute…

Peu à peu s’effaçait le grincement de l’essieu du monde, et le grondement sur les pavés du char lourd de l’action, qui se perdait dans le lointain. Et s’élevait le chant divin du silence,

Le bruit d’abeilles, le parfum de tilleul…
Le vent,
Avec ses lèvres d’or frôlant le sol des plaines…
Le doux bruit de la pluie avec l’odeur des roses.

On entendait sonner le marteau des poètes, sculptant aux flancs du vase

La fine majesté des plus naïves choses,
la vie grave et joyeuse,
Avec ses flûtes d’or et ses flûtes d’ébène,
la religieuse joie, la foi qui sourd comme une fontaine des âmes
Pour qui toute ombre est claire,…