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DANS LA MAISON

n’est pas plus douce et plus ardente que cet accouplement de deux âmes amies. Elles avaient fini par se fondre si bien qu’il leur arrivait d’avoir les mêmes éclairs de pensée, à la fois. Ou bien Christophe écrivait la musique d’une scène, dont Olivier trouvait ensuite les paroles. Il l’emportait dans son sillage impétueux. Son esprit couvrait l’autre, et le fécondait.

Au bonheur de créer se joignait le plaisir de vaincre. Hecht venait de se décider à publier le David ; et la partition, bien lancée, avait eu un retentissement immédiat, à l’étranger. Un grand kapellmeister wagnérien, ami de Hecht, établi en Angleterre, s’était enthousiasmé pour l’œuvre ; il l’avait donnée, à plusieurs de ses concerts, avec un succès considérable, qui s’était répercuté, avec l’enthousiasme du kapellmeister, en Allemagne, où le David avait été joué aussi. Le kapellmeister s’était mis en relations avec Christophe ; il lui avait demandé d’autres ouvrages, il lui avait offert ses services, il faisait pour lui une propagande acharnée. On redécouvrit en Allemagne l’Iphigénie, qui y avait jadis été sifflée. On cria au génie. Certaines circonstances de la vie de Christophe, par leur tour romanesque, ne contribuèrent pas peu à piquer l’attention. La Frankfurter Zeitung publia, la première, un article retentissant. D’autres suivirent. Alors, quelques-uns, en France, s’avisèrent qu’ils avaient chez eux un grand musicien. Un des directeurs de concerts de Paris