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ANTOINETTE

riche de gibier, ou un gros bouquet de fleurs pour ces dames. Il en profitait pour faire sa cour à mademoiselle. Ils se promenaient ensemble dans le jardin. Il lui faisait des compliments gros comme le bras, et badinait agréablement, en frisant sa moustache, et faisant sonner ses éperons sur les dalles de la terrasse. Antoinette le trouvait charmant. Son orgueil et son cœur étaient délicieusement caressés. Elle s’abandonnait à ces premières heures si douces d’amour enfantin. Olivier détestait le hobereau, parce qu’il était fort, lourd, brutal, qu’il riait d’un rire bruyant, qu’il avait des mains qui serraient comme des étaux, et une façon dédaigneuse de l’appeler toujours : « Petit… », en lui pinçant la joue. Il le détestait surtout, — sans le savoir, — parce que cet étranger aimait sa sœur : … sa sœur, son bien à lui, à lui, et à nul autre !…