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ANTOINETTE

surtout pour des gens qui n’aimaient pas la musique — (il le voyait très bien), — que la musique ennuyait même, et qui vous faisaient jouer seulement par habitude, lui semblait une tyrannie, contre laquelle il tentait de s’insurger en vain. Il refusait obstinément. Certains soirs, il se sauvait ; il allait se cacher dans une chambre noire, dans le corridor, et jusqu’au grenier, malgré sa peur horrible des araignées. Sa résistance rendait les insistances plus vives et plus narquoises ; les objurgations des parents s’y mêlaient, agrémentées de quelques claques, quand l’esprit de révolte soufflait trop impertinemment. Et il devait toujours finir par jouer, — naturellement, en dépit du bon sens. Ensuite, il souffrait, la nuit, d’avoir mal joué, parce qu’il avait de l’amour-propre, et parce qu’il aimait vraiment la musique.

Le goût de la petite ville n’avait pas toujours été aussi médiocre. On se souvenait