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JEAN-CHRISTOPHE À PARIS

jours, était la plus brave. Bien que cela l’ennuyât mortellement, — comme elle savait qu’il n’y avait pas moyen d’y échapper, elle en prenait son parti, allait s’asseoir au piano, d’un petit air décidé, et galopait son rondo, à la diable, bredouillant certains passages, à d’autres pataugeant, s’interrompant, tournant la tête, disant avec un sourire :

— Ah ! je ne me souviens plus…

puis, reprenant bravement, quelques mesures plus loin, et allant jusqu’au bout. Après, elle ne cachait pas son contentement d’avoir fini ; et, quand elle revenait à sa place, au milieu des compliments, elle riait, en disant :

— J’en ai fait, des fausses notes !…

Mais Olivier était d’humeur moins facile. Il ne pouvait supporter de s’exhiber en public, d’être le point de mire de toute une société. C’était déjà pour lui une souffrance de parler, quand il y avait du monde. Jouer,