Page:Rolland - Jean-Christophe, tome 6.djvu/24

Cette page a été validée par deux contributeurs.

8
JEAN-CHRISTOPHE À PARIS

place dans sa pensée. Il était républicain ardemment modéré, libéral avec intolérance, patriote, et, à l’image de son père, extrêmement anticlérical. Il faisait partie du conseil municipal ; et un plaisir pour lui, comme pour ses collègues, était de jouer quelque bon tour au curé de la paroisse, ou au prédicateur du carême, qui excitait tant d’enthousiasmes parmi les dames de la ville. Il ne faut pas oublier en effet que cet anticléricalisme des petites villes françaises est toujours, plus ou moins, un épisode de la guerre des ménages, une forme sournoise de cette lutte sourde et âpre entre maris et femmes, qui se retrouve dans presque toutes les maisons.

Antoine Jeannin avait aussi des prétentions littéraires. Comme les gens de province de sa génération, il était nourri de classiques latins, dont il savait par cœur quelques pages et une quantité de proverbes, de La Fontaine, de Boileau, — le