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ANTOINETTE

dans le bon train, et il guettait le nom de chaque station. Antoinette sommeillait à demi, et se réveillait sans cesse ; les cahots du wagon faisaient ballotter sa tête. Olivier la regardait, à la lueur de la lampe funéraire, qui luit au faîte de ces sarcophages ambulants ; et il fut frappé subitement de l’altération de ses traits. Le tour des yeux était creusé ; la bouche au dessin enfantin s’entr’ouvrait avec lassitude ; le teint de la peau était jauni, et de petits plis fripaient çà et là les joues, où se voyait la marque des tristes jours de deuils et de désillusions. Elle avait l’air vieillie, malade. — Et en vérité, elle était si fatiguée ! Si elle avait osé, elle eût retardé le départ. Mais elle n’avait pas voulu gâter le plaisir de son frère ; elle voulait se persuader que son mal n’était que de la fatigue, et que la campagne la remettrait. Ah ! comme elle avait peur de tomber malade, en route ! — Elle eut conscience qu’il la regardait ; et,