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JEAN-CHRISTOPHE À PARIS

fois, à leurs soirées. M. Alfred Nathan était un professeur très connu à Paris, savant éminent, en même temps très mondain, avec ce mélange baroque de science et de frivolité, si commun dans la société juive. Chez Mme Nathan se mêlaient dans d’égales proportions une bienfaisance réelle et une mondanité excessive. Tous deux avaient été prodigues envers Antoinette de démonstrations de sympathie bruyante, sincère, d’ailleurs intermittente. — Antoinette avait trouvé, en général, plus de bonté parmi les Juifs que parmi ses coreligionnaires. Ils ont bien des défauts ; mais ils ont une grande qualité, — la première de toutes, peut-être : ils sont vivants, ils sont humains ; rien d’humain ne leur est étranger, ils s’intéressent à ceux qui vivent. Même quand il leur manque une vraie et chaude sympathie, ils ont une curiosité perpétuelle qui leur fait rechercher les âmes et les pensées de quelque prix, fussent-elles le