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ANTOINETTE

l’Ami divin, qui souffre avec vous, et qui, un jour, vous consolera. Plus encore qu’avec Dieu, elle était en communion intime avec ses morts, et elle les associait en secret à toutes ses épreuves. Mais elle était indépendante d’esprit, et de ferme raison ; elle restait à part des autres catholiques, et n’était pas très bien vue d’eux ; ils trouvaient en elle un mauvais esprit ; ils n’étaient pas loin de la regarder comme une libre penseuse, ou sur le chemin de l’être, parce qu’en bonne petite Française, elle n’entendait pas renoncer à son libre jugement : elle croyait, non par obéissance, comme le vil bétail, mais par amour.

Olivier ne croyait plus. Le lent travail de désagrégation de sa foi, commencé dès les premiers mois à Paris, l’avait détruite tout entière. Il en avait cruellement souffert ; car il n’était pas de ceux qui sont assez forts, ou assez médiocres, pour se passer de la foi : aussi avait-il traversé des crises