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ANTOINETTE

était notoirement anticlérical. Tout ce que Mme  Jeannin réussit à trouver, après mille efforts, fut une place de professeur de piano dans un couvent, — métier ingrat et ridiculement payé. Afin de gagner un peu plus, elle faisait de la copie, le soir, pour une agence. On était très dur pour elle. Son écriture et son étourderie, qui lui faisait sauter parfois un mot, une ligne, malgré son application — (elle pensait à tant d’autres choses !) — lui attirèrent des observations blessantes. Il arriva qu’après s’être brûlé les yeux et courbaturée à écrire jusqu’au milieu de la nuit, elle se vit refuser sa copie. Elle rentrait, bouleversée. Elle passait des journées à gémir, sans prendre aucun parti. Depuis longtemps, elle souffrait d’une maladie de cœur, que les épreuves avaient aggravée, et qui lui inspirait de sinistres pressentiments. Elle avait parfois des angoisses, des étouffements, comme si elle allait mourir. Elle ne sortait plus sans avoir