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ANTOINETTE

nin », dont il flétrit durement le suicide. Mme Jeannin prit la défense de son mari. Le sénateur dit qu’il savait bien que ce n’était pas par malhonnêteté, mais par bêtise, que le banquier avait agi, que c’était un niais, un pauvre hanneton, ne sachant rien, et ne voulant jamais en faire qu’à sa tête, sans demander conseil à personne, et sans écouter aucun avertissement. S’il s’était perdu seul, on n’aurait rien à dire : ce serait bien fait pour lui. Mais, — sans parler des autres ruines, — qu’il eût jeté sa femme et ses enfants dans la misère, et qu’ensuite il les plantât là, les laissant se débrouiller comme ils pourraient…, cela, c’était affaire à Mme Jeannin de le lui pardonner, si elle était une sainte ; mais lui, sénateur, qui n’était pas un saint — (s, a, i, n, t), — qui se flattait d’être seulement un homme sain — (s, a, i, n), — un homme sain, sensé et raisonnable, — lui, n’avait aucun motif pour pardonner : l’individu qui se suicidait en