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JEAN-CHRISTOPHE À PARIS

un prétexte quelconque, fit passer les Jeannin dans une chambre à côté. (Il voulait cacher à ses amis l’existence, et surtout la présence chez lui, de la famille compromettante.) On laissa les Jeannin seuls, dans la chambre sans feu. Les enfants étaient hors d’eux, de ces humiliations. Antoinette avait les larmes aux yeux ; elle voulait qu’on partît. Sa mère lui résista d’abord : puis, l’attente se prolongeant, elle se décida. Ils sortirent. Dans l’antichambre, Poyet, averti par un domestique, les rattrapa, s’excusant par quelques paroles banales ; il feignait de vouloir les retenir ; mais on voyait qu’il avait hâte qu’ils fussent partis. Il les aida à passer leurs manteaux, les poussa vers la porte, avec des sourires, des poignées de main, des amabilités à voix basse, et il les mit dehors. — Rentrés dans leur hôtel, les enfants pleurèrent de rage, Antoinette trépignait, jurait qu’elle ne mettrait plus les pieds jamais chez ces gens.