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De retour à Paris après la longue convalescence, installée dans un petit hôtel qu’elle avait loué à Passy, elle ne prit plus aucun soin de « ménager l’opinion » ; elle se sentait le courage de la braver, pour son ami. Leur vie était désormais si intimement mêlée qu’elle eût jugé lâche de cacher l’amitié qui les unissait, au risque — inévitable — que cette amitié fût calomniée. Elle recevait Christophe, à toute heure du jour ; elle se montrait avec lui, en promenade, au théâtre ; elle lui parlait familièrement devant tous. Personne ne doutait qu’ils ne fussent amants. Colette elle-même trouvait qu’ils s’affichaient trop. Grazia arrêtait les allusions, d’un sourire, et passait outre, tranquillement.

Pourtant elle n’avait donné à Christophe aucun droit nouveau sur elle. Ils n’étaient rien qu’amis ; il lui parlait toujours avec le même respect affectueux. Mais entre eux, rien n’était caché ; ils se consultaient sur tout ; et insensiblement, Christophe arrivait

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