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trou d’une citerne ? Tu fais peur aux oiseaux du ciel. Qu’attends-tu ? Qu’une alouette toute rôtie tombe dedans, ou bien le pleur d’une hirondelle ? Pendant ce temps, moi, je me tue, je souffle, je sue, je m’évertue, je peine comme un vieux cheval, pour servir cet animal !… Va, faible femme, c’est ton lot !… Eh bien, non, non, car le Très-Haut n’a pas dit que nous aurions toute la peine, et que Adam irait de-ci, de-là, flânant, et les mains derrière le dos. Je veux qu’il souffre aussi, et je veux qu’il s’ennuie. Si c’était autrement, s’il s’amusait, le gueux, il y aurait de quoi désespérer de Dieu ! Par bonheur, je suis là, moi, afin d’accomplir ses saintes volontés. As-tu fini de rire ? Au travail, si tu veux faire bouillir le pot !… Eh ! voyez s’il m’écoute ! Grouilleras-tu bientôt ?

Avec un doux sourire, je dis :

— Mais oui, ma belle. Ce serait un péché de rester au logis, par ce matin joli.

Je rentre à l’atelier, je crie aux apprentis :

— Il me faut, mes amis, une pièce de bois, liant, doux, et serré. Je vais voir chez Riou, s’il a dans l’entrepôt quelque beau madrier. Hop ! Cagnat ! Robinet ! Allons faire notre choix.

Eux et moi, nous sortons. Et ma vieille criait. Je dis :

— Chante toujours !

Mais ce dernier conseil n’était pas nécessaire. Quelle musique ! Je sifflais, pour renforcer le couplet. Le bon Cagnat disait :

— Eh ! maîtresse, on croirait qu’on s’en va-t-en