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planche lisse où glisse le rabot, sans rencontrer un nœud. Et je m’en étonnais. Je demandais :

— Où donc sont cachés les brigands ?

lorsqu’on cria :

— Au feu !

Parbleu ! Ils pillaient ailleurs.

Dans la rue, un homme essoufflé nous apprit que toute la bande mettait à sac les entrepôts de Pierre Poullard, en Bethléem, hors la porte de la tour Lourdeaux, brisait, brûlait, buvait à tire-larigot. Je dis aux compagnons :

— S’ils veulent des violons pour danser, nous voici ! Nous courûmes à la Mirandole. De la terrasse, on dominait la ville basse, d’où montait dans la nuit un bruit de sabbat. Sur la tour de Saint-Martin, haletant, le tocsin grondait.

— Camarades, il va falloir descendre, dis-je, en la fournaise. Ça va chauffer. Sommes-nous prêts ? Mais d’abord, il faut un chef. Qui le sera ? Veux-tu, Saulsoy ?

— Non, non, non, non, fit-il, faisant trois pas à reculons. Je n’en veux pas. C’est bien assez que je sois ici, à minuit, obligé de me promener avec ce vieux mousquet. Ce qu’on voudra, ce qu’il faudra, je le ferai, — hors commander. Merci Dieu ! je n’ai jamais su rien décider…

Je demandai :

— Alors, qui veut ?

Mais aucun d’eux ne remua. Je les connais, ces oiseaux-là ! Parler, marcher, encore cela va. Mais décider, il n’y a plus personne. L’habitude de finasser