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Comme si je n’étais point là, le Maillebois disait tout haut à sa commère :

— Puisque aussi bien, madame, nous n’avons rien à faire, profitons de ce pauvre hère ; il a l’air un peu niais, il va de-ci, de-là, sonnant du flageolet : il doit connaître bien le peuple des cabarets. Enquérons-nous de lui de ce que la province pense, si tant est…

— Chut !

—… Si tant est qu’elle pense.

On me demanda donc :

— Eh bien, bonhomme, dis-nous, quel est l’esprit du pays ?

Je répète :

— L’esprit ?

en prenant l’air d’un abruti.

Et je clignais de l’œil à un gros sieur d’Asnois, qui se tirait la barbe et me laissait aller, riant sous sa large patte.

— L’esprit ne m’a pas l’air de courre la province, dit l’autre avec ironie. Je te demande, bonhomme, ce qu’on pense, ce qu’on croit. Est-on bon catholique ? Est-on dévoué au roi ?

Je réponds :

— Dieu est grand, et le roi est très grand. On les aime bien tous deux.

— Et que pense-t-on des princes ?

— Ce sont de grands messieurs.

— On est donc avec eux ?

— Oui-dà, monseigneur, oui.

— Et contre Concini ?

— On est pour lui, aussi.