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Bourgogne, des héros de roman. Nous vivons : nous vivons. Quand on nous a fait naître, on ne nous a pas demandé si cela nous agréait, nul ne s’est informé si nous voulions la vie ; mais puisque nous y sommes, nom d’un bonhomme, j’y reste. Le monde a besoin de nous… À moins que ce ne soit nous qui ayons besoin de lui. Qu’il soit bon ou mauvais, pour que nous le quittions faut qu’on nous mette dehors. Vin tiré, faut le boire. Vin bu, tirons-en d’autre de nos coteaux mamelus ! On n’a pas le temps de mourir, quand on est Bourguignon. Pour ce qui est de souffrir, tout aussi bien que vous (ne soyez pas si fiers), nous nous en acquittons. Pendant quatre ou cinq mois, j’ai souffert comme un chien. Et puis, le temps nous passe et laisse nos chagrins, trop lourds, sur l’autre rive. À présent je me dis :

— C’est comme si je l’avais eue…

Ah ! Belette ! Belotte !… Tout de même, je ne l’ai point eue. Et c’est ce tripeandouille, Gifflard, sac à farine, face de potiron, qui l’a, qui la pelote, la mignote, Belotte, depuis trente ans passés… Trente ans !… son appétit doit être rassasié ! À ce que l’on m’a dit, il n’en avait plus guère, dès le lendemain du jour où il l’a épousée. Pour ce goulu, ce glou, morceau avalé n’a plus goût. Sans le charivari qui fit au lit, au nid, trouver maître coucou (Ah ! Pinon le braillard ! ), jamais l’écornifleur ne se fût laissé pincer à mettre son gros doigt en anneau trop étroit… Io, Hymen, Hyménée ! Bien attrapé, ma foi ! Plus attrapée, Belette : car meunier mécontent se paie sur sa bête. Et le plus attrapé des trois, c’est