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— Pourquoi ? N’a rien à redouter, car je suis loyale en marché. Mais qu’il le soit pareillement ! Car sinon, le garnement, s’il me trompe, est prévenu : le jour ne passera point qu’il ne soit coquericocu. Chacun son bien. À lui le sien. À moi le mien. Donc, qu’il fasse son devoir !

— Tout son devoir.

— Dame, il faudrait un peu voir qu’il se plaignît que la pucelle fût trop belle !

— Ah ! diablesse, je ne m’abuse, c’est toi qui répondis à la buse, qui rapportait l’ordre du ciel.

— Je connais plus d’un busard, dit-elle, mais sans plumes. Duquel veux-tu parler ?

— Connais-tu pas, dis-je, l’histoire de la buse que des commères envoyèrent à Notre Père, pour demander que les marmots, à peine éclos, pussent trotter sur leurs deux jambes ? Le bon Dieu dit : « Je le veux bien. » (Il est galant avec les dames.) « Je ne demande en échange rien qu’une petite condition à mes aimables paroissiennes : que désormais, sous l’édredon, femmes, filles et fillettes couchent seulettes. » La buse emporta, fidèle, le message sous son aile ; et je n’étais point là, le jour qu’il arriva ; mais je sais que le messager en entendit de belles !

Martine s’arrêta, sur les talons assise, de frotter pour pousser de grands éclats de rire ; et puis, me bouscula, en criant :

— Vieux bavard ! plus qu’un pot à moutarde, bavard, baveux, bavant ! Va-t’en de là, va-t’en ! Conteur de balivernes ! À quoi es-tu bon, dis ?