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BEETHOVEN

mun une profonde imprégnance poétique, qui fait de chacun un poème, tantôt épique ou élégiaque, tantôt dramatique, aussi précis et lié ensemble, mais pénétrant bien plus à fond du subconscient que les beaux poèmes qui s’expriment dans la langue des mots. Le miracle Beethovenien est que jamais le dessin poétique ne s’imprime sur le tissu instrumental, comme un apport extra-musical. Ils font corps ensemble. L’un ne se distingue point de l’autre. Rien de commun avec la musique à programme. Qui dit programme, dit intrusion et primauté du dehors. Tout, chez Beethoven, vient du dedans, du profond de l’être. Comme les vapeurs du trépied Pythique. Cette musique est une voix de la Terre, que l’esprit ne crée point, mais qu’il reçoit et qu’il ordonne, selon des lois secrètes d’harmonie. C’est notre critique qui, pour l’expliquer, lui cherche une équivalence dans les mots. Mais notre traduction ne saurait jamais se substituer au texte. Elle ne prétend qu’au rôle d’introducteur dans a l’autre monde » de la « Tondichtung… »

« Tondichter » (poète en musique), c’était le titre que Beethoven revendiquait, avec justesse et fierté. Il faut l’entendre, sans intermédiaire Quand vous aurez lu notre livre, fermez le livre, oubhez-nous… Et écoutez !