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LES DERNIERS QUATUORS

guéri, le met à la porte, il lui faut être, jusqu’à son départ pour le régiment, sous surveillance de tutelle ; et c’est Beethoven qui le reprend. Il a eu soin, dans sa seconde lettre au magistrat, de faire aviser Charles, en le relâchant, « qu’il sera surveillé par la police, sans qu’il le voie, pendant le temps qu’il habitera chez son oncle. » Dans ces conditions, on juge de l’agrément du tête-à-tête !…

Sur ces entrefaites, le frère Jean, propriétaire foncier, « Gutbesitzer », venu à Vienne pour affaires, invite Beethoven à passer chez lui, dans sa propriété de campagne, à Gneixendorf, l’arrière-automne. Et comme il ne peut s’attarder en ville, les soins de gestion de son domaine le réclamant, il faut que Beethoven se décide, en deux jours. Beethoven accepte, à contre-cœur[1]. Il le faut bien ! Où pourrait-il aller prendre sa villégiature ? La belle saison touche à son terme. De tout l’été, il n’a pu s’absenter de Vienne ; et sa santé souffre de n’avoir pas fait sa cure annuelle, à la campagne. Mais que fera-t-on du neveu ?… Qu’à cela ne tienne ! On l’emmènera. Puisqu’il n’a plus à rester que huit jours !…

Les huit jours s’allongeront, de semaine en semaine. Ils dureront plus de deux mois. Ils eussent duré une année, si l’oncle Jean n’y avait mis le holà !…

  1. La proposition du frère Jean était raisonnable, et elle permettait de faire l’économie d’un logement : les soins médicaux donnés au neveu et les frais de son établissement grèvent lourdement le budget de l’oncle. Ces raisons forcent l’acceptation de Beethoven.