Page:Rolland - Beethoven, 5.djvu/323

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
301
LES DERNIERS QUATUORS

du motif que lui fournissaient ses Cahiers de notes. Ce n’est pas qu’il ait mis moins d’art à l’utiliser. Il n’y a point trace de négligence ; et le style est d’un maître-écrivain. Mais on peut penser qu’en d’autres temps, le grand Colloque avec le Destin eût trouvé un répondant plus étoffé et plus héroïque.

Prenons-le tel qu’il était, en septembre-octobre 1826.

« Grave, ma non troppo tratto… »

— « Muss es sein ? »… La question est posée, par deux fois, dans les basses, p. d’abord, puis cresc. insistant, avec un sérieux profond. Elle éveille, à chaque fois, dans les violons et l’alto, des réflexions (je dirais volontiers des objections) troubles et pénibles. Elles sont suivies de sept violents groupes d’accords de septièmes et de septièmes diminuées, par trois coups répétés, à chaque fois, — comme une révolte de la volonté. Cette résistance, qui monte jusqu’au ff., à la 6e mes., faiblit, devant l’impérieuse insistance de la question, qui elle aussi a haussé la voix, jusqu’à tonner (9e mes.) : l’opposition baisse de ton, décroît, se ralentit, et capitule, sur l’unisson d’ut, dominante de fa, dont on ne sait encore s’il est ombre ou lumière.

Et c’est lumière. Vient la réponse, en fa majeur, allegro joyeux, — le « Es muss sein ! », qui n’offre aucun caractère de nécessité acceptée, ni même de « résolution difficilement prise », selon le titre, — mais de gai vouloir, qui se met en route allègrement, sur un dessin d’accompagnement entraînant, d’abord forte, piqué, et bien marqué, puis poursuivant p., lié et balancé, comme des amis qui se donnent la main. Le dessin prête aux jeux multiples et serrés de la polyphonie, qu’allègent les bonds, les pauses, les caprices badins de la fantaisie. Un changement de coloris, en la majeur, amène une broderie d’accords arpégés, d’où se détache