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LES DERNIERS QUATUORS

Qui ne voit que la phrase a été reprise pour le finale du quatuor, dont la pensée de Beethoven était alors occupée ? Est-ce à dire qu’il y ait le moindre rapport entre l’occasion bouffonne qui l’a dictée et le sens qu’elle prend dans le quatuor ? — En aucune façon.

Pour s’y tromper, il faut n’avoir pas la baguette de fée du musicien qui, comme l’enfant Jean-Christophe, transforme tout ce qu’il touche, le thème qui le visite, selon l’appel de la voix intérieure. De qui, cette voix ? Du caprice de l’artiste, ou de l’essence même du thème, jailli du subconscient ? Haendel et Beethoven ont constamment lu et relu, dans les thèmes qu’ils avaient trouvés, des significations qui leur avaient d’abord échappé. Et, le plus souvent, c’était la dernière, non la première, qui était la vraie. — L’anecdote, racontée par Holz, prouve simplement que la phrase musicale, issue d’une boutade, a plu à Beethoven, en quête de motifs pour son quatuor, et qu’il l’a jugée de bonne prise. Nous en pourrions déduire, tout au plus, que, dans le travail de ce quatuor, infiniment plus simple et plus réduit que les précédents, son inspiration n’était plus aussi nombreuse qu’aux mois d’abondance, où il écrivait, avec le quatuor en si bémol, les esquisses de vingt autres œuvres. Il faisait flèche de tout bois. — Mais l’habileté du maître n’avait en rien décru. Tout au contraire. Nous allons le voir, — en remettant à l’analyse du finale, de dégager le sens qu’y a pris le coup de boutoir au grippe-sous, qui prétendait avoir sans payer.