ous avons faussement tendance à croire que les derniers
quatuors de Beethoven ont été incompris
de ses contemporains, et que nous commençons à
peine à les découvrir. C’est méconnaître la finesse de sensibilité
musicale d’une élite Viennoise. Le quatuor en la
mineur produisit une impression profonde sur le petit cercle
qui entourait Beethoven. Il n’est pas inutile d’en rendre
compte, pour rétablir les couleurs du tableau des dernières
années de Beethoven, que la légende a faussé. On y verra, du
même coup, l’état de jubilation et d’euphorie où se trouvait
Beethoven, au sortir du quatuor ex-voto du « convalescent
au Dieu qui l’a guéri ».
Beethoven était pressé d’entendre exécuter son œuvre. Il eût voulu que ce fût dans sa propre maison, à Baden. Les difficultés de communication avec Vienne, pour les artistes, l’y firent renoncer. On décida que l’audition aurait lieu à Vienne, le 9 septembre (1825), et que Beethoven s’y rendrait, de Baden. On répéta, le mercredi 7, dans la chambre de l’éditeur Schlesinger. Holz, qui tenait le deuxième violon, en rend compte, le 8, à Beethoven. « Nous étions enchantés ». Le neveu Charles y assistait, et Wolfmayer, le riche marchand drapier, l’ami fidèle de vingt-cinq ans, à qui Beethoven a dédié son dernier quatuor, « pleura, à l’adagio, comme un enfant ». — Le vendredi 9 septembre, Schlesinger alla prendre Beethoven en voiture à Baden, et le mena à l’hôtellerie du Wilden Mann, au Prater, où l’hôtelier avait mis à la disposition des organisateurs une grande chambre. Les exécutants étaient Schuppanzigh, Holz, Weis, et Lincke. Assistaient, en petit comité, le visiteur anglais Sir George Thomas Smart, un des fondateurs de la Philharmonie Society de Londres,