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GŒTHE ET BEETHOVEN

mais leur exactitude morale est démontrée, à mes yeux, par les circonstances que je vais raconter, et par deux autres lettres, celles-ci trop certaines, l’une de Beethoven à Breitkopf (9 août 1812), l’autre de Goethe à Zelter (9 septembre 1812) — sans parler des racontars de Teplitz, qui sont assez éloquents.

Je tâcherai de voir les deux hommes et de les dire tels qu’ils sont, avec leur grandeur et avec leurs petitesses. De celles-ci, il en est dans les génies, autant et plus que dans les hommes ordinaires. Et Beethoven, comme Goethe, en eurent largement leur part.

Le plus généreux, au début, (je l’ai dit), ce le lendemain. Mais « noua » peut signifier, à défaut de Bettine absente, son mari Arnim et sa sœur Mme de Savigny. Et Beethoven, qui tenait à conter l’histoire à Bettine, en personne, a pu la lui écrire, le lendemain. Il est vrai que la lettre de Beethoven porte la date de Teplitz, août 1812 alors qu’en août il n’était déjà plus à Teplitz, mais à Karlsbad ou à Franzensbrunn, et que la scène de Teplitz se passa en juillet. Mais Bettine retrouvant, vingt ans après, le lettre de Beethoven, non datée, y aura suppléé de mémoire, selon ses habitudes. On a aussi contesté la présence, en ces jours, de l’archiduc Rodolphe, qui est mentionné dans la lettre : (« der Herzog Rudolf hat mir den Hut abgezogen »). Mais là encore, Bettine a pu vouloir compléter l’indication de Beethoven, et ajouter, de bonne foi, le nom qui manquait. En tout cas, qu’elle fût alors à Teplitz et qu’elle y ait reçu le* confidences de Beethoven, c’est absolument prouvé, et nul ne le conteste. Son témoignage est de premier ordre. J’ajoute que, des deux documents, la lettre de Bettine est le plus complet et le plus révélateur, bien que la lettre de Beethoven contienne un des traits les plus magnifiques qui aient jailli de la bouche da Beethoven : il eût fallu être un second Beethoven pour l’inventer.